
Si elles sont secrètes, alors le saurions-nous ? 😉
Avant de pouvoir prétendre répondre à ces questions, pas si saugrenues que cela, il parait indispensable de s’accorder sur ce qu’on entend par “société secrète”.



Définition
Si vous avez lu d’autres de mes articles, vous avez pu vous apercevoir que j’aime bien passer dans un premier temps par la case “définition”. Cela vous permet de cerner précisément le sujet abordé, sans quiproquo.
Vous savez comme moi qu’une petite broutille couplée à un malentendu peut créer un énorme problème ! Nous n’avons pas tous la même perception du sens d’un mot, d’une expression ou d’une expérience.
Alors pour les sujets un peu… tendus, il est d’autant plus important d’être le plus limpide possible.



Qui dit définition dit dictionnaire ! Et, bande de chanceux que nous sommes, même plus besoin de sortir le bon gros livre poussiéreux de notre bibliothèque. Un tour sur un moteur de recherche suffit.
Larousse décrit la société secrète comme une “organisation clandestine, structurée, dont les membres sont étroitement liés par des règles impératives”.
Pour esquisser une idée générale d’un mot ou d’une idée, le dico est parfait. MAIS, il est TRÈS important d’approfondir votre approche, car tout savoir encyclopédique peut s’avérer erroné. Si vous vous êtes déjà posé la question, vous en avez certainement eu la preuve. Je vous invite d’ailleurs à jeter un œil à cet article sur les consensus scientifiques.
Par exemple, dans notre cas Larousse, le mot “clandestine” de la définition m’interpelle.
La clandestinité implique une notion d’interdiction et/ou d’illégalité. Ce terme apporte donc un jugement de valeur à notre définition. Et une définition, ce doit être neutre et impartial.
Difficile d’interdire quelque chose que l’on ignore, non ? Et si celui qui légifère ne l’ignore pas, rien n’affirme qu’il sera contre.



Approche sociologique
Prendre un peu de recul sur le sujet s’avère très intéressant ! Après quelques recherches historiques, on s’aperçoit vite que des sociétés secrètes ont toujours existé (ou presque), de l’antiquité à aujourd’hui.
Réelles ou fantasmées, elles ont même suscité un grand intérêt à toute époque.
D’un côté le besoin d’imaginer un ennemi tout-puissant à abattre (les membres d’une société secrète, avec un ennemi commun, ou les autres, contre les premiers). Et de l’autre le besoin de se retrouver en groupe restreint autour d’un centre d’intérêt commun (appartenir à une société secrète ou militer à plusieurs contre une société secrète). Quoi qu’il en soit, les sociétés secrètes semblent répondre à de réels besoins de la société.
Le sujet se raccorde à la perfection à la Pyramide de Maslow (ci-contre), dans les besoins de sécurité, d’appartenance, d’estime et d’accomplissement.
Retour rapide sur la pyramide de Maslow : elle représente les cinq besoins fondamentaux de l’être humain, que l’on débloque par palier, en ayant préalablement répondu au besoin précédent.



Sociétés secrètes, oui, mais avec quel pouvoir ?
Cette expression plurielle implique qu’il est possible, et même probable, que toutes les sociétés secrètes n’ont pas les mêmes objectifs.
Désolée de vous décevoir, mais il vous faut accepter que toute société secrète ne cherche pas l’asservissement de l’humanité.
Les “intellectuels” (par exemple chez Larousse) qui ont déjà réfléchi au sujet (comme quoi il peut y avoir des gens sérieux qui s’y intéressent) ont même classé les sociétés secrètes en deux grandes catégories.
Il y aurait des sociétés secrètes “initiatiques” et des sociétés secrètes “politiques”. Les deuxièmes ayant apparemment le plus de risques de regrouper des méchants.
Trêve de plaisanterie : quand on pense au Klux Klux Klan, il devient difficile de rire.



Les atrocités pas secrètes
Car oui, ce truc immonde de Klux Klux Klan, c’est bien une société secrète, même si tout le monde a toujours eu connaissance de son existence et que seule l’identité de ses membres demeure cachée. J’emploie le présent, car il semblerait que cette société soit encore active.
D’un sujet loufoque, on tombe maintenant dans les pires atrocités de l’humanité.
Il ne faut pas farfouiller longuement dans le lisier de notre passé et de notre présent pour en trouver de toutes sortes, des ignominies.
L’antisémitisme est, lui aussi, à rapprocher du sujet des sociétés secrètes. Dans tous les siècles de l’Histoire, les Juifs ont été persécutés par une partie de l’humanité, les accusant de tous les maux (politiques, sanitaires, théologiques, économiques…). Des gens ignares les pensent tous en conspiration les uns avec les autres, avec des objectifs aussi variés que les nuances de la stupidité des théoriciens du complot juif.
Une fois encore, nous pouvons utiliser le présent.
Dans ce cas, c’est donc la peur d’une hypothétique société secrète qui crée le pire.
A se demander qui a le pouvoir : le secret ou la peur ?



Après le pire, ou est le meilleur ?
Ou en tout cas le “moins pire” ?
En n’étant pas trop restrictif avec l’expression “société secrète”, on peut projeter son schéma sur beaucoup de types de groupe, et sans aller jusqu’aux francs-maçons (il fallait bien les citer quand même !).
Du club privé de riches ultra select au comité de direction d’une multinationale, certaines personnes s’entourent de ritualisation, de secret, d’enjeux mondiaux et parfois même d’illégalité.
En abordant le sujet sous cet angle, il devient difficile d’affirmer que les “sociétés secrètes” ne dirigent pas le monde. Plutôt bof, comme “moins pire”.
Abus de langage que de comparer la direction de grandes firmes mondiales à des sociétés secrètes, pensez-vous peut-être… En êtes-vous sûr·e ?
Jusque là, nous avons surtout abordé les sociétés secrètes dites “politiques”, dont les ambitions sont donc tournées vers des intérêts impliquant une grande zone (quartier, ville, région, pays, continent…) et des personnes exclues du groupe et ignorantes.
Finalement, les “intellectuels” avaient plutôt raison : ça ne sent vraiment pas bon de ce côté.



Intronisations et rituels
Après ces sociétés secrètes “politiques”, passons à présent à leurs sœurs “initiatiques”.
Comme vous l’aurez compris, c’est l’aspect initiatique qui serait ici la raison d’être de ces sociétés.
Ce serait donc la ritualisation des relations entre les membres qui les lierait entre eux.
Caractéristiques requises pour être accepté, intronisation, code langagier propre, rituel de regroupement (etc.) seraient le socle commun.
Manque tout de même le (vrai) centre d’intérêt, car la ritualisation peut sembler insuffisante. Un masque et une poignée de main parait léger pour unir de nombreuses personnes à travers le temps.
Évidemment, le processus rituel est bien plus complexe, avec différentes hiérarchies à franchir pour accéder à l’élite des privilégiés.
L’aspect initiatique ressemble cependant, à mon sens, bien plus à un système de fonctionnement qu’à un objectif à part entière.
De plus, des groupes comme le Klux Klux Klan montrent des spécificités ritualistes très marquées (comme leur déguisement).



Les théories du complot
Expression souvent associée à la thématique des sociétés secrètes, ces théories ont tiré le tout vers l’excentricité et la loufoquerie.
Il faut avouer qu’on en trouve des vertes et des vraiment pas mûres !
L’exemple le plus approprié pour étayer cette affirmation est sans doute la théorie du platisme.
Certaines personnes pensent que la Terre est plate et qu’il y aurait un complot mondial visant à le cacher à l’humanité.
Je souligne que ce ne sont donc pas les platistes qui sont à l’origine d’un complot ; ils en seraient victimes (tout comme nous, pauvres abusés). Je fais cette précision car le terme “complotistes” est régulièrement employé à tort.
Les platistes accusent donc une société secrète (tellement secrète quelle est inconnue) de comploter pour parvenir à faire croire à tous que la Terre est ronde.
Cela peut paraitre fou, car il n’est même pas utile d’aller dans l’espace pour en observer la courbure, un espace marin ou terrestre vaste suffisant.
Tellement fou qu’un français sur dix croirait que la Terre est plate, selon un sondage IFOP présenté par National Geographic.
Il existe ainsi de nombreuses théories du complot, plus incroyables les unes que les autres.
Si stupéfiantes qu’elles discréditent le sujet en intégralité. Car théories du complot ou sociétés secrètes, ces thématiques sont pertinentes à souhait.



Le secret au cœur des religions
Et oui, le sujet peut être encore plus tendu qu’il ne l’était déjà. Enfin, quel sujet ne l’est pas de nos jours…
Ritualisation, hiérarchie, savoirs non-démontrés, etc., permettent une corrélation évidente avec la question théologique.
Et le secret ? Il n’est plus dans l’existence cachée, mais dans les rouages mystérieux. Si mystérieux que seuls les initiés les connaissent, et les non-initiés leur doivent confiance.
Je ne vais citer qu’un exemple, mais cela est transposable à toutes les religions.
Jusqu’en 1965, l’Eglise catholique célébrait toutes les messes en latin, et non en français. Alors qu’une petite minorité de la population maitrisait cette langue morte. Pourquoi, selon vous ?
Là, nous baignons autant dans le secret que dans le complot. Et qui oserait dire que les religions n’ont aucun contrôle sur le monde ?
Le sujet des sociétés secrètes est évidemment bien plus profond que ce que nous avons pu survoler dans cet article.
Mais nous avons cependant pu voir qu’il est parfaitement légitime, voire important.
Nous vivons actuellement une période troublée et inédite, qui peut inspirer le secret et le complot.
Finalement, sociétés secrètes, théories du complot ou crise sanitaire, c’est la séparation qui l’emporte.
“Diviser pour mieux régner”, c’est pourtant connu, non ?


